Fiche thématique n°16 : Le devenir des infrastructures pétrolières et gazières dans le contexte de la fin des énergies fossiles

Le gaz et les produits pétroliers représentent encore plus de 60% de la consommation finale d’énergie en France, et sont aujourd’hui importés en quasi-totalité. Sortir au plus vite de cette dépendance est une triple nécessité, pour notre objectif de neutralité climatique en 2050, pour diminuer notre dépendance géopolitique à des ressources qui s’épuisent et pour améliorer notre balance commerciale.

La Stratégie nationale bas carbone publiée en avril 2020 (SNBC2) prévoit une évolution majeure de notre système énergétique avec sa décarbonation complète en 2050. Concrètement, les émissions de gaz à effet de serre liées à la consommation et à la production d’énergie en 2050 sont réduites à quelques émissions résiduelles difficilement compressibles (aviation, fuites de gaz, procédés de méthanisation ou de raffinage…). En particulier, il n’y a presque plus d’émissions liées à la combustion des énergies fossiles. Au cours du temps, la consommation finale d’énergie voit disparaître le charbon puis le pétrole (à l’exception d’une partie des carburants aériens). Le gaz ne garde une place dans le système énergétique que sous la forme de gaz renouvelable ou d’hydrogène décarboné. La France porte ainsi l’ambition d’être le premier grand pays du monde à sortir des énergies fossiles.

Les enjeux liés aux énergies fossibles et à l'évolution des infrastructures associées

Les produits pétroliers représentent plus de 40% de notre consommation finale d’énergie. La consommation des produits pétroliers a baissé depuis le milieu des années 2000 pour les usages hors transports (électricité, chauffage notamment). En revanche, la consommation des carburants pour le transport a augmenté depuis les années 2000 (sauf cas particulier de l’année 2020 du fait de la crise sanitaire).

Engagée dans une réduction de la consommation de produits pétroliers, la logistique pétrolière française connaît depuis 2008 une profonde restructuration de son secteur qui s’est manifestée notamment par la fermeture de plusieurs raffineries et le resserrement des actifs pétroliers (oléoducs et dépôts). La logistique pétrolière demeure très résiliente avec des stocks stratégiques qui représentent trois mois de consommation.

Dans le contexte de décroissance programmée des énergies fossiles, le niveau de consommation des produits pétroliers demeure encore très élevé (forte demande du transport) et nécessite au moins jusqu’en 2040, de maintenir une infrastructure pétrolière, de transport, de stockage et de distribution de produits pétroliers adaptée et capable de répondre aux enjeux environnementaux et de sécurité d’approvisionnement. Ces infrastructures peuvent être soumises à des contraintes réglementaires (en particulier pour limiter les risques industriels et l’impact sur l’environnement) qui nécessitent des investissements financiers dont la rentabilité n’est plus pleinement assurée au vu des objectifs de réduction de gaz à effet de serre.

Par ailleurs, le développement des carburants décarbonés liquides va également connaitre un essor croissant. Le secteur de l’aérien restera sur une logistique liquide en grande partie, de même que certaines flottes de véhicules nécessitant encore l’usage d’une motorisation thermique et de certaines gammes de véhicules (armées, forces de sécurité intérieure, services d’urgence et de secours, machineries). Les infrastructures actuelles ont un rôle à jour pour contribuer à la logistique des énergies décarbonées d’aujourd’hui et de demain dont certaines pourraient nécessiter une adaptation technologique et par conséquent des investissements onéreux. Enfin, la réduction à venir de la consommation de produits pétroliers fossiles va nécessairement réduire progressivement le nombre de stations-services fossiles historiques.

Il convient de ne pas désoptimiser trop brusquement la chaîne de valeur de la logistique pétrolière afin de l’accompagner progressivement et au rythme de la décroissance des énergies fossiles, vers une décarbonation totale de son secteur. En particulier, l’État devra être très attentif à l’apparition de zones blanches qui pourraient mettre des usagers en difficulté, en intervenant si nécessaire pour maintenir un service jusqu’à ce que ce ne soit plus nécessaire.

Avec une consommation primaire de gaz d’environ 450 TWh, le gaz naturel (méthane), représente près de 20% de notre consommation finale d’énergie. On compte sur le territoire national 37 600 km de réseau de transport et plus de 200 000 km de canalisations de distribution, ainsi que 4 terminaux méthaniers, et 11 stockages souterrains de gaz naturel.

Dans les scénarios énergétiques visant à atteindre l’objectif de neutralité carbone, les contraintes sur la disponibilité de biomasse et la recherche de l’efficacité énergétique par une limitation des opérations de transformations peuvent conduire à contraindre les quantités de biogaz et de méthane de synthèse pouvant être produites. La SNBC2 prévoit une consommation en combustibles gazeux (gaz renouvelable et hydrogène décarboné) de 195 TWh (295 TWh dans la variante « gaz haut »).

Ce scénario de neutralité carbone, avec une importante production de gaz renouvelable (biogaz) sur le territoire national, impliquera à terme une forte modification des flux de gaz naturel par rapport à ceux actuellement observés, où une très large majorité du gaz consommé est du gaz naturel d’origine fossile importé par un nombre limité d’interconnexions et de terminaux méthaniers. Des adaptations des infrastructures gazières, pour les rendre compatibles avec ces perspectives de production et de consommation, ainsi qu’avec les flux associés, pourraient être nécessaires pour être en mesure d’assurer la sécurité d’approvisionnement des consommateurs de gaz naturel à moyen terme.

La DGEC a lancé fin 2021 avec la Commission de régulation de l’énergie une étude sur les futurs des infrastructures gazières et leurs fonctionnements dans des scénarios de neutralité carbone. Cette étude a vocation à identifier les infrastructures gazières nécessaires pour assurer la sécurité d’approvisionnement des consommateurs de gaz naturel à horizon 2050 et analyser les conséquences pour le cadre de régulation associé à ces infrastructures. Elle doit également permettre d’identifier si certaines infrastructures gazières sont susceptibles de ne plus être utilisées pour l’acheminement de gaz naturel, et pourraient ainsi être disponibles pour une éventuelle réutilisation pour l’acheminement d’hydrogène décarboné.