Fiche thématique n°1 : L'éolien en mer
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L’éolien en mer est l’une des principales filières à développer pour atteindre les objectifs de transition énergétique que s’est fixée la France. Cette filière présente de nombreux avantages :
- Une importante production d’électricité : les vents sont plus forts et régulier en mer que sur terre et les éoliennes sont plus grandes et plus puissantes, et permettent d’avoir un facteur de charge d’environ 42%1.
- Une électricité décarbonée : l’éolien en mer émet très peu de gaz à effet de serre tout au long de son cycle de vie, de sa construction à son démantèlement, et participe à l’atteinte des objectifs de transition énergétique en France.
- Une électricité compétitive : l’éolien en mer affiche des coûts de production à la baisse et des prix proches de ceux du marché (voire très inférieurs dans le contexte de crise des prix de l’énergie). Le dernier appel d’offre pour le parc au large de Dunkerque a proposé un tarif de l’électricité de 44 €/MWh, très proche des prix de marché de l’électricité de l’époque.
- Une technologie mature : l’éolien en mer bénéficie d’un important retour d’expérience en Europe et d’une filière industrielle française.
Une éolienne est constituée d’un mât, d’une nacelle (comprenant la turbine) et de 3 pales, installés sur des fondations. En fonction de la profondeur des fonds marins, la technologie et les fondations retenues varient. L’éolienne peut être (la limite se situe autour de 60 mètres de profondeur environ) :
- Posée sur le fond marin grâce à des fondations de trois types différents (monopieu, treillis ou embase gravitaire) – on parle alors d’éolienne posée.
- Portée par un support flottant, ancrée au fond marin – on parle alors d’éolienne flottante.
Les éoliennes sont ensuite raccordées au réseau d’électricité par des liaisons sous-marines jusqu’au littoral. La production et l’installation des éoliennes sont réalisées par un développeur éolien, tandis que le gestionnaire du réseau et de transport d’électricité RTE est responsable du raccordement et de la réalisation du poste électrique en mer.
1 Source : “Wind energy in Europe 2020 Statistics and the outlook for 2021-2025 ?” Wind Europe, https://windeurope.org/intelligence-platform/product/offshore-wind-in-europe-key-trends-and-statistics-2020/
Les projets éoliens en France et les objectifs du secteur
La France bénéficie du deuxième gisement de vent pour l’éolien en mer en Europe, après le Royaume-Uni. Il s’agit donc de l’énergie renouvelable présentant le plus fort potentiel de développement dans les décennies à venir.
La France soutient le développement de l’énergie éolienne en mer depuis une dizaine d’années. L’État a lancé trois procédures de mise en concurrence pour des parcs éoliens en mer posés en 2011, 2013 et 2016. Ils totalisent 3,6 GW et sont répartis en sept projets sur la façade Manche Est – Mer du Nord (Courseulles-sur-Mer, Fécamp, Dieppe – Le Tréport et Dunkerque) et sur la façade Nord Atlantique – Manche Ouest (Saint-Brieuc, Saint-Nazaire et Yeu – Noirmoutier). Début juin 2022, le parc de Saint-Nazaire a produit et injecté sur le réseau ses premiers MWh d'électricité.
La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE2) fixe des objectifs d’attribution de parcs éoliens en mer par année et par façade maritime, avec des tarifs cibles pour l’électricité (entre 45 et 60 €/MWh pour l’éolien posé, et 110 à 120 pour l’éolien flottant). La PPE2 prévoit l’attribution de projets éoliens pour une puissance cumulée entre 3,85 et 4,35 GW, dont 750 mégawatt (MW) en flottant et 2,5 à 3 GW en posé, entre 2019 et 2023, puis au moins 1 GW par an à partir de 2024, afin d’atteindre une capacité installée d’éolien en mer de 2,4 GW en 2023 et environ 5 GW en 2028.
Ainsi, trois nouvelles procédures de mise en concurrence ont été lancées en 2021 et 2022 : un parc posé de 1 GW en Normandie, un parc flottant de 250 MW au sud de la Bretagne, deux projets flottants en Méditerranée. Un débat public pour un projet en Sud-Atlantique et une concertation préalable pour un deuxième parc en Normandie se sont également tenus en 2022.
Pour atteindre l’objectif de neutralité carbone à horizon 2050, le rapport « Futurs énergétiques 2050 » de RTE propose des scénarios variés avec un niveau d’éolien en mer compris entre 22 GW et 62 GW en 2050, soit entre 1 et 2 GW installés par an. En retenant une perspective moyenne de 40 GW en 2050, le niveau annuel d’attribution de projet potentiellement inscrit dans la prochaine PPE pourrait correspondre à plus de 2 GW par an jusqu’en 2040.
Quels sont les enjeux liés à l’implantation d’un parc éolien en mer ?
Le bilan carbone d’un parc éolien en mer mesure la quantité de gaz à effet de serre (GES) émis pendant toute la durée de vie du parc, depuis sa conception jusqu’à son démantèlement à l’issue de son exploitation. Le bilan carbone des parcs éoliens ayant obtenu leurs autorisations a été estimé comme suit :
- De 554 000 à 754 000 tonnes éqCO2 émises sur l’ensemble de la durée de vie du parc ;
- Un facteur d’émission entre 14 et 18 g éqCO2/kWh produit, ce qui le place parmi les sources de production d’électricité avec le bilan le plus faible.
Un temps de retour énergétique (ratio entre l’énergie consommée pendant la durée de vie du parc et l’énergie produite par le parc) de 4,5 à 6 ans2.
2 Source : Etudes d’impact des six premiers parcs de 500 MW chacun.
Tout au long de son cycle de vie, un parc éolien génère des impacts temporaires ou permanents sur l’environnement, positifs ou négatifs.
Le développeur éolien pour le parc et RTE pour le raccordement doivent chacun obtenir une autorisation environnementale conformément au code de l’environnement. La délivrance de ces autorisations est soumise à une étude d’impact et fait l’objet d’une participation du public.
L’étude d’impact vise à identifier les enjeux environnementaux dans la zone du projet, que ce soit pendant la phase d’installation, d’exploitation et de démantèlement. Elle détaille les mesures à mettre en œuvre pour éviter, réduire et compenser ces impacts. Ces mesures sont ensuite encadrées par les autorisations.
Les principaux risques environnementaux existants sont le bruit marin pendant la construction et la collision avec l’avifaune (oiseaux, chauve-souris) pendant l’exploitation. Néanmoins, le retour d’expérience des projets à l’étranger témoigne aussi d’opportunités pour la biodiversité : effet récif (colonisation d’espèces benthiques sur les mâts et fondations et de leurs prédateurs) et effet réserve (moindre intensité de la pêche dans la zone du parc).
Dans l’objectif de développer et diffuser la connaissance sur l’éolien en mer, le Premier Ministre a annoncé en août 2021 l’installation de l’Observatoire national de l’éolien en mer. Ce dernier a pour missions de :
- Regrouper, valoriser et rendre accessibles au plus grand nombre les études et données existantes sur l’éolien en mer, y compris le retour d’expérience des parcs déjà existants à l’étranger.
- Définir et piloter des programmes d’acquisition de connaissances (nouvelles campagnes de mesures sur le milieu marin et amélioration des connaissances sur l’impact des éoliennes sur le milieu marin, y compris les mesures de réduction des impacts).
- Contribuer à définir une méthode homogène et cohérente de suivi scientifique de l’impact environnemental des futurs parcs.
L’Observatoire national de l’éolien en mer est doté d’un budget de 50 millions d’euros sur 3 ans.
La France a pour objectif de favoriser autant que possible la compatibilité des usages au sein des parcs éoliens en mer, dans les limites permises par la sécurité de la navigation maritime. Ainsi, les parcs éoliens en mer français sont conçus pour que la pêche y soit possible. Les développeurs éoliens s’y sont engagés auprès de l’Etat. Des dispositions techniques peuvent être adoptées : espacement entre les éoliennes, alignement des éoliennes, ensouillage ou protection des câbles pour les couloirs de navigation… afin de faciliter le maintien de l’activité de pêche. Les pratiques de pêche au sein des parcs en exploitation seront réglementées par les autorités compétentes en fonction de l’analyse des enjeux de sécurité de navigation maritime et des pratiques envisagées (arts trainants, arts dormants…).
Le démantèlement des parcs éoliens en mer est une obligation inscrite dans le cahier des charges des appels d’offres et prescrite par les autorisations nécessaires à la réalisation du projet.
Il est réalisé par le développeur éolien dans le respect de l’environnement et doit permettre le recyclage d’un maximum de composants des parcs éoliens. Les éoliennes en mer posées sont constituées en majorité de parties métalliques comme le mât et le rotor, qui représentent plus de 90% de leur poids. Ces parties sont entièrement recyclables. Les 10% restants, notamment les pales, sont faits de matériaux composites, c’est-à-dire constitués d’un assemblage de matériaux différents comme la fibre de verre et de carbone, de résines polyester ou d’époxy. Le recyclage de ces 10% restants est un défi. Des solutions existent et des avancées technologiques sont à prévoir pour le recyclage de ces matériaux. Des filières dédiées à la gestion de ces déchets seront créées. L’Etat encourage les développeurs à recycler les pales via les conditions des appels d’offre. Les câbles électriques sont composés de métaux, principalement du cuivre, de l’aluminium ou encore des alliages de ces métaux, et de plastique. Ils sont envoyés en filière spécialisée de retraitement pour un ré-usage à 100%.
Le démantèlement des éléments qui constituent le parc éolien en mer est à la charge de l'entreprise exploitant le parc. Des garanties financières sont fournies par le développeur éolien à l’État afin de permettre à ce dernier de couvrir les frais de démantèlement si la société exploitant le parc manquait à ses obligations.
Les modalités de démantèlement du raccordement sont définies par l’État dans les autorisations demandées par RTE. Une étude portant sur les impacts des opérations de déconstruction et de remise en état du site est réalisée avant la fin de l’exploitation afin de préciser le périmètre du démantèlement et de déterminer les conditions de la remise en état du site.
Les effets d’un projet éolien sont appréhendés dans toutes leurs dimensions : enjeux patrimoniaux et de paysage, trafic et sécurité maritime, défense nationale, activités portuaires et touristiques. La conciliation avec l’ensemble de ces usages est recherchée au cas par cas pour chaque projet.
Quelles sont les opportunités économiques ?
Les coûts d’un parc éolien dépendent du gisement de vent, de la distance entre le parc et la côte, de la nature des fonds marins, de la profondeur et du relief du fond marin (bathymétrie), ainsi que des choix technologiques.
Le coût de chacun des sept premiers projets de parcs éoliens en mer français de 500 MW se situe entre 1,42 et 2,23 milliards d’euros. La maturité de la filière a permis de faire baisser les coûts de financement, et donc d’augmenter la rentabilité de ce type de projets à partir des années 2015.
En 2021, l’éolien en mer a représenté plus de 5 200 emplois en France. Cette forte croissance, liée au lancement de la construction des premiers parcs, devrait se poursuivre dans les années à venir avec de nouveaux projets. La majeure partie de l’activité industrielle se déroule en France avec des usines de production de nacelles (rotors) à Saint-Nazaire et de pales à Cherbourg, appartenant à General Electric (GE). De nouveaux moyens de production, à l’instar de ceux de Siemens Gamesa au Havre pour la production de nacelles et de pales et de l’agrandissement des usines GE de nacelles à Saint-Nazaire et de pales à Cherbourg, vont engendrer des emplois supplémentaires et des retombées économiques locales.
Les ports de Saint-Nazaire (Pays de la Loire), de Brest (Bretagne) et de Port-la-Nouvelle (Occitanie) ont d’ores et déjà réalisé des aménagements afin d’accueillir de nouvelles activités liées au développement de l’éolien en mer. D’autres ports pourraient également participer au dynamisme économique sur le territoire français en engageant des transformations similaires (La Rochelle, Le Havre, Bordeaux, …).
Un parc éolien génère une taxe éolienne en mer. En 2022, la taxe est de 18 605 € par an par MW installé, soit 18,6 millions d’euros pour un parc de 1 GW. Quand le parc éolien est installé sur le domaine public maritime, c’est-à-dire dans les 12 milles nautiques (22 km des côtes), cette taxe est reversée à différents acteurs : les collectivités locales (50% des recettes de la taxe), les acteurs de la pêche (35%), mais aussi l’Office Français de la Biodiversité (10%) et les organismes de secours et de sauvetage en mer (5%). Quand le parc est au-delà du domaine public maritime, cette taxe est affectée au budget général de l’Etat.
L’éolien flottant est une technologie prometteuse permettant d’implanter des parcs plus loin des côtes, en s’affranchissant de la profondeur des fonds marins. Les éoliennes flottantes peuvent ainsi être installées dans des zones dont la profondeur est supérieure à 50 mètres. Ces zones se situent majoritairement en zone économique exclusive, à plus de 22 km des côtes.
La France a amorcé dès 2015 la montée en puissance de l’éolien flottant par le financement de 4 fermes pilotes et est aujourd’hui le premier pays à avoir lancé des appels d’offres commerciaux pour des projets éoliens flottants : 250 MW au sud de la Bretagne, et deux fois 250 MW dans le golfe du Lion. La France fait donc aujourd’hui partie des pays au premier rang du développement de cette technologie.
Pour conserver cette avance, la stratégie d’accélération « Technologies Avancées des Systèmes Energétiques » (TASE), encadrée par le plan France 2030, priorise l’éolien flottant pour renforcer la compétitivité et de l’indépendance de l’économie française. Cette stratégie cherche à faire de la France un leader industriel en la matière par la structuration d’une chaîne de valeur complète sur le territoire. La stratégie TASE est mise en œuvre via plusieurs appels à projet et à manifestation d’intérêt, de la recherche amont jusqu’aux phases de préparation de l’industrialisation, notamment sur l’aménagement des ports et l’implantation d’usines.
La planification de l’éolien en mer
Pour le développement de l’éolien en mer, deux processus, l’un de planification, l’autre de programmation, coexistent. La planification spatiale maritime, prévue par la Stratégie Nationale pour la Mer et le Littoral (SNML) et déclinée dans les Documents Stratégiques de Façade (DSF), détermine des zones à vocation éolien en mer. La programmation énergétique, encadrée par la Loi de programmation énergie climat (LPEC) et la Programmation pluriannuelle de l’Energie (PPE), détermine des objectifs de développement de capacité éolien en mer (en GW).
L’attribution des projets se fait par des procédures de mise en concurrence. Des débats publics sont organisés en amont de ces procédures. La consultation du public porte sur les caractéristiques et l’opportunité du projet ainsi que l’identification de zones préférentielles pour un parc éolien et son raccordement.
Afin de donner une meilleure visibilité au public, la loi d'accélération et de simplification de l'action publique de décembre 2020 (dite loi ASAP) a introduit la possibilité de mener les débats publics sur l’éolien en mer à l’échelle de chaque façade maritime, afin de préparer le lancement de nouveaux projets dans les sept années suivantes. Pour aller plus loin, le Gouvernement a proposé dans le projet de loi d’accélération des énergies renouvelables de permettre la mutualisation des débats publics pour l'éolien en mer et le document stratégique de façade. Cela permettrait de mieux articuler le développement de l’éolien en mer et la planification de l’espace maritime.
L’Etat organise ensuite un dialogue concurrentiel pour désigner l’exploitant qui construira puis exploitera le parc, sur la base de critères économiques, environnementaux et de développement économique de la filière.