Fiche thématique n°4 : L'hydroélectricité

L’hydroélectricité transforme l’énergie des lacs et des cours d’eau en électricité. Une installation hydroélectrique est généralement composée d’un ouvrage de retenue (barrage) permettant le cas échéant de stocker l’eau et de l’orienter vers une usine de production. Dans celle-ci, elle met en mouvement une turbine associée à un alternateur afin de produire de l’électricité.  La puissance électrique est proportionnelle, en fonction de l’installation, à la hauteur de chute et au débit turbiné.

Les installations se répartissent en plusieurs catégories en fonction de leurs caractéristiques : des centrales au fil de l’eau qui turbinent tout ou partie du débit d’un cours d’eau, jusqu’aux centrales « de lac » qui disposent d’une grande retenue et peuvent stocker l’eau pendant plusieurs mois pour produire de l’électricité à la demande.

Il existe également des stations de transfert d’énergie par pompage (STEP) qui sont des centrales hydroélectriques fonctionnant entre deux retenues d’eau d’altitudes différentes et permettent de stocker de l’électricité à grande échelle : ces installations pompent des volumes d’eau pendant les périodes de moindre consommation d’électricité vers le réservoir supérieur et les turbinent pendant les pics de consommation électrique.

Etat des lieux de la filière, objectifs actuels et à plus long terme

Puissance hydraulique installé par région en France en 2021
Puissance hydraulique installée par région (Source : Panorama de l’électricité renouvelable au 31 décembre 2021 Agence Ore-Enedis-RTE-SER)

Les régions françaises dont la puissance hydraulique installée est égale ou supérieure à 3000 MW sont :
la région Auvergne-Rhône-Alpes avec 11 452 MW
La région Occitanie avec 5 283 MW ;
la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur avec 3273 MW


Les régions françaises dont la puissance hydraulique installée est comprise entre 1000 MW et 3000 MW sont :
La région Nouvelle-Aquitaine avec 2222 MW ;
la région Grand Est avec 2311 MW ,

Les régions françaises dont la puissance hydraulique installée est comprise entre 100 MW et 1000 MW sont :
La région Bourgogne-Franche Comté avec 522 MW ;
La région Bretagne avec 275 MW ;
La Région Corse avec 223 MW ;

Les régions françaises dont la puissance hydraulique installée est inférieure à 100 MW sont :
La région Ile-de-France avec 20 MW
la Région Pays de la Loire avec 11 MW ;
La région Normandie avec 30 MW
La région Centre-Val de Loire avec 92 MW
la région Hauts-de-France avec 4 MW ;

Avec une puissance installée de plus de 26,1 GW, dont 25,5 GW en France continentale, la France est historiquement bien équipée grâce à un développement important des ouvrages hydroélectriques dès le début et tout au long du vingtième siècle. Comme les années précédentes, en 2021, l’hydroélectricité a représenté la première source d’électricité renouvelable en France (avec un peu plus de 60TWh soit environ 50% de la production électrique renouvelable) et la deuxième source de production électrique derrière le nucléaire (12% de la production électrique).

Grâce aux centrales de lac et aux STEP, la filière hydroélectrique est particulièrement importante pour le système électrique, notamment en termes d’équilibre et de sécurisation du réseau. Les stations de transfert d’énergie par pompage (STEP) et les barrages hydroélectriques constituent actuellement le moyen de stockage à grande échelle le plus important en France (environ 5 GW de STEP et 13 GW d’hydraulique avec réservoir).

Juridiquement, les installations hydroélectriques sont exploitées soit sous le régime de la concession (pour celles ayant une puissance maximale supérieure à 4,5 MW) ou sous celui de l’autorisation environnementale (pour celles ayant une puissance maximale inférieure à 4,5 MW).

La grande majorité de la production est assurée par les installations de plus de 10 MW, exploitées principalement par 3 concessionnaires : EDF, CNR et la SHEM. Les régions du Sud et de l’Est de la France métropolitaine concentrent la très grande majorité des capacités de production hydroélectriques qui sont situées principalement dans les massifs montagneux des Alpes, du Massif Central, des Pyrénées et du Jura et le long du Rhône et du Rhin. Les départements d’outre-mer de La Réunion et de la Guyane sont également bien équipés en installations hydroélectriques (qui représentent 50% de la production électrique guyanaise).

L’enjeu actuel pour l’État est d’assurer la modernisation et la compatibilité du parc hydroélectrique aux exigences accrues de sécurité et de protection et de restauration de l’environnement, et de permettre le développement des capacités hydroélectriques et de stockage d’autre part conformément aux objectifs fixés dans la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).

La PPE adoptée en avril 2020 vise à augmenter la puissance hydroélectrique installée en France continentale de l’ordre de 200 MW d’ici 2023 (soit 25,7 GW), et de 900 MW à 1200 MW d’ici 2028 (soit de 26,4 à 26,7 GW), pour permettre une production supplémentaire de l’ordre de 3 à 4 TWh dont environ 60% par l'optimisation d’aménagements existants.

Concernant les STEP, la PPE fixe comme objectif d’engager d’ici à 2023 les démarches permettant le développement de STEP pour un potentiel de 1,5 GW, en vue des mises en service des installations entre 2030 et 2035.

Plusieurs mesures ont été prises pour soutenir le développement de la filière et accroître la puissance installée en prenant en compte l’ensemble des enjeux, en particulier environnementaux. Il s’agit notamment d’un soutien économique pour les installations autorisées selon le principe d’un arrêté tarifaire (l’Etat reverse un soutien à la production d’électricité en fonction des caractéristiques de l’installation et des investissements qui ont été nécessaires) ou via un appel d’offres. L’appel d’offres « petite hydroélectricité » a été reconduit pour les années 2021 et 2022, pour un volume de 35 MW par an et devrait être poursuivi au-delà, conformément à la PPE. Au sein des concessions hydroélectriques, la loi énergie climat du 8 novembre 2019, a ouvert la possibilité de procéder à des augmentations de puissances par déclaration, sous certaines conditions. Plusieurs mesures complémentaires sont à l’étude, telles qu’un soutien à la rénovation des installations de puissance comprise entre 1 et 4,5 MW. Enfin, quelques projets de nouvelles concessions sont en cours d’examen ou d’instruction.

Dans tous les scénarios envisagés par RTE dans son étude « Futurs énergétiques 2050 », les objectifs de développement des installations hydroélectriques à horizon 2050 sont identiques : 30 GW donGW de STEP contre 26 GW dont 5 GW de STEP aujourd’hui.

En particulier le développement du stockage hydraulique (les STEP) est considéré comme « sans regret » du point de vue technique ou économique. Le développement des capacités hydroélectriques ne pourra se faire qu’en prenant en compte les enjeux environnementaux - notamment en termes de biodiversité, hydrologiques avec la baisse annoncée des débits en raison du changement climatique, et économiques pour assurer la viabilité des installations de stockage en particulier.

Les enjeux environnementaux et économiques

Afin de préserver la qualité des milieux aquatiques et de garantir les autres usages de l’eau, la réglementation environnementale applicable aux ouvrages hydroélectriques a été sensiblement renforcée : maintien d’un débit minimum dans le cours d’eau, aménagements de rétablissement de la continuité écologique, dispositifs pour limiter la mortalité piscicole, etc.

Les projets hydroélectriques soulèvent des problématiques environnementales très différentes suivant la nature du projet (équipement d’un barrage existant ou nouvelles installations sur un site vierge), la taille du projet et selon le lieu d’implantation (sensibilité environnementale des sites). Il convient de considérer notamment les questions de circulation des poissons, de transit des sédiments, de modification du régime hydrologique, d’ennoiement. Enfin, quel que soit le projet, les effets cumulés sont à évaluer lorsque des ouvrages équipent déjà le cours d’eau concerné, notamment en termes de continuité écologique ou lorsqu’un ennoiement est envisagé.

Ainsi, les suréquipements ou les nouveaux aménagements permettant d'améliorer la flexibilité du parc doivent être priorisés en comparaison avec des projets de faible puissance sur des sites présentant une sensibilité environnementale particulière, au coût plus élevé et au bénéfice moins important pour le système électrique au regard de leur impact environnemental.

L’énergie hydraulique produit de l’électricité bas-carbone. Selon l’étude « Futurs énergétiques 2050 » de RTE, l’hydroélectricité se distingue aujourd’hui par une empreinte carbone particulièrement faible (6 g CO2eq/kWh), nettement inférieur à celle de centrales thermiques fossiles, et la plus basse des énergies bas carbone.

Émissions en cycle de vie des technologies bas-carbone en 2020 et 2050 (évolution pessimiste et tendancielle)
Émissions en cycle de vie des technologies bas-carbone en 2020 et 2050 (évolution pessimiste et tendancielle) (Source : RTE, Chapitre 12 L’analyse environnementale de l’étude « Futurs énergétiques 2050 »)

Pour la Biomasse:
Le bois émet 66 grammes de CO2 par KWh électrique en 2020, il est envisagé qu’il dégage un nombre équivalent en 2050 selon une évaluation pessimiste (faible amélioration technologique) mais également en selon une évolution tendancielle (amélioration technologique).

Le biogaz agricole émet 70 grammes de CO2 par KWh électrique en 2020, il est envisagé qu’il dégage un nombre équivalent en 2050 selon une évaluation pessimiste mais également en selon une évolution tendancielle.

Pour les énergies renouvelables:
L’énergie photovoltaïque émet 43 grammes de CO2 par KWh électrique en 2020, il est envisagé qu’elle dégage 28 grammes de CO2 par KWh électrique en 2050 selon une évaluation pessimiste et 14 grammes de CO2 par KWh électrique en selon une évolution tendancielle en 2050.

L’éolien terrestre émet 16 grammes de CO2 par KWh électrique en 2020, il est envisagé qu’elle dégage 15 grammes de CO2 par KWh électrique en 2050 selon une évaluation pessimiste et 13 grammes de CO2 par KWh électrique en selon une évolution tendancielle en 2050.

L’éolien en mer émet 14 grammes de CO2 par KWh électrique en 2020, il est envisagé qu’elle dégage 10 grammes de CO2 par KWh électrique en 2050 selon une évaluation pessimiste et 7 grammes de CO2 par KWh électrique en selon une évolution tendancielle en 2050.

L’énergie hydraulique émet 6 grammes de CO2 par KWh électrique en 2020, il est envisagé qu’elle dégage un chiffre équivalent en 2050 selon une évaluation pessimiste mais également en selon une évolution tendancielle.

L’énergie nucléaire émet 7 grammes de CO2 par KWh électrique en 2020, il est envisagé qu’elle dégage 6 grammes de C02 par KWh électrique 2050 selon une évaluation pessimiste mais également en selon une évolution tendancielle.

En 2019, le marché de l’hydroélectricité s’élève à 3,1 Mds€1, dont 2,4 Mds€ pour la production d’électricité (exploitation, maintenance, vente d’énergie). Le montant des investissements intérieurs réalisés dans l’hydroélectricité, notamment pour la rénovation du parc, a augmenté de 693 M€ en 2017 à 768 M€ en 2019, soit une hausse de 12%. La filière représente 12 520 emplois en 2019 (estimations), en hausse de 7% par rapport à 2017. Il s’agit ici des emplois directs associés au marché de l’hydroélectricité (ne sont pas inclus les emplois indirects comme les fournisseurs des fabricants). En raison de la localisation des installations hydroélectriques, une partie de ces emplois et de l’activité économique et des ressources fiscales générées par la production hydroélectrique se situe dans les différentes vallées françaises, au cœur de territoires parfois éloignés des métropoles.

Les secteurs d’activités se répartissent de la manière suivante. D'abord, le secteur de l’« équipement » : fabrication de turbines et autres équipements (hydromécaniques, roues, régulateurs). Ensuite, le « génie civil » : construction et rénovation des barrages (dispositifs de continuité écologique compris), incluant les études techniques préalables. Enfin, la « production d’énergie » : vente d’électricité, exploitation, entretien et maintenance courante, qui représente la plus grande partie des emplois directs (plus de 9000 emplois). On compte en France environ 1700 exploitants de petites et grosses centrales hydroélectriques, 25 fabricants de turbines et conduites, 60 bureaux d’études (environnement et expertise technique), 15 fournisseurs de matériels électriques et électrotechniques spécifiques.

La France dispose d’une filière industrielle solide, composée de nombreuses entreprises de toutes tailles, intervenant notamment dans l’électronique, le génie civil, les automatismes, la fabrication de turbines et de conduites forcées. La filière française exporte largement son savoir-faire à l’étranger.

Le coût de l’hydroélectricité est très variable en fonction des différentes types d’installations. Il peut s’étendre de 30 €/MWh à 90 €/MWh entre les grandes installations au fil de l’eau et celles de lac. Le coût de la petite hydroélectricité est en moyenne plus élevé et plus dispersé, il s’étend de 37 €/MWh à plus de 200 €/MWh2 pour les installations neuves.

En raison du développement relatif modeste envisagé de la production hydroélectrique, le nombre d’emplois ou les besoins de formation du secteur ne devraient pas significativement évoluer par rapport à leur niveau actuel.