Fiche thématique n°9 : La flexibilité du système électrique

Le système électrique doit à tout moment être en mesure d’assurer l’équilibre entre la consommation et la production.

L’augmentation de la consommation électrique, sous l’effet de l’électrification directe des usages, conduira dans les prochaines années à une augmentation de la production électrique décarbonée. Au sein de cette électricité décarbonée, la part d’énergies renouvelables non pilotables sera également de plus en plus importante, et la part des moyens carbonés pilotables (charbon, fioul et gaz) sera de moins en moins importante.

Le système devra donc être en mesure, à tout moment d’assurer l’équilibre entre cette consommation grandissante et dont le profil sera profondément modifié par les usages et la production dont une grande partie ne sera pas pilotable. C’est ce qu’on appelle la flexibilité du système électrique.

Cette flexibilité peut être mobilisée aussi bien du côté de l’offre (centrales hydroélectriques par exemple), que de la demande (lissage des pics de consommation), mais comprend également le stockage (incluant notamment les batteries électriques et les stations de transfert d’énergie par pompage) ainsi que les flexibilités du réseau grâce aux interconnexions entre pays voisins.

La flexibilité du système électrique est ainsi un outil essentiel pour la transition énergétique et la transformation associée du mix de production, notamment pour intégrer une part croissante d’énergies renouvelables variables au réseau. Elle constitue par ailleurs un levier d’optimisation des investissements nécessaires pour le réseau.

La flexibilité de la demande et les besoins en stockage

La flexibilité de la demande consiste, en cas de déséquilibre offre-demande d'électricité, à provisoirement réduire ou augmenter la consommation d’électricité d'un site donné ou d'un groupe d'acteurs. Elle constitue un levier pouvant contribuer :

  • à l’adéquation long-terme entre l’offre et de la demande ;
  • à l’équilibre offre-demande aux différents horizons temporels ;
  • à la réduction des congestions sur les réseaux et des besoins de renforcement de ceux-ci.

Le développement de la flexibilité de la demande permet aussi de limiter le besoin en capacités thermiques et en batteries.

Les usages concernés par la flexibilité de la demande sont nombreux : charge des véhicules électriques, eau chaude sanitaire (chauffe-eaux souvent pilotés par le signal heures pleines / heures creuses), chauffage, climatisation, procédés industriels, usages tertiaires, etc.

La flexibilité de la demande signifie avant tout d’être en mesure de la piloter. Ce pilotage est aujourd’hui réalisé principalement grâce au principe d’effacement de la consommation, c’est-à-dire la réduction temporaire de sa consommation d’électricité par rapport à sa consommation normale, sur une base volontaire. Les fournisseurs et certains opérateurs spécialisés proposent à leurs clients (des particuliers ou des sites industriels) des solutions techniques pour « mettre en pause » pendant quelques minutes ou quelques heures certains de leurs équipements dont la consommation est flexible (c'est-à-dire pour les particuliers : radiateurs, ballons d’eau chaude, climatiseurs, et pour les industries : fours industriels…). Cette pause permet de passer une pointe de consommation sans recourir à un moyen de production supplémentaire.

La consommation n’est ainsi pas annulée, mais simplement reportée à un moment où le système électrique sera moins en tension.

Le système électrique français s’appuie sur une capacité de pilotage de la demande historique, avec la mise en place dès les années 80 des incitations tarifaires à consommer aux heures de moindre tension dans l’équilibre Production/Consommation grâce au système Heures Creuses/Heures Pleines (HC/HP).

La PPE 2019-2028 détaille des objectifs ambitieux de développement des capacités d’effacement de consommation électrique : 4,5 GW en 2023, 6,5 GW en 2028. L’objectif en 2028 est réparti entre 5 GW d’effacement industriel et tertiaire et 1,5 GW d’effacement diffus. Des mesures de soutien spécifiques sont mises en place pour atteindre ces objectifs, comme l’appel d’offre effacement par lequel RTE contractualise chaque année des capacités d’effacement.

L’étude « Futurs énergétiques 2050 » de RTE démontre que l’essor des énergies renouvelables nécessaire pour atteindre l’objectif de neutralité carbone devrait s’accompagner d’un recours accru aux technologies de stockage, notamment à partir de 2035.

Le stockage d’électricité répond aux mêmes besoins de flexibilité que le pilotage de la demande, ainsi qu’aux besoins induits par le caractère non pilotable des énergies renouvelables (éolien et photovoltaïque). Il permet en effet d’équilibrer la production et la consommation en stockant de l’électricité lorsque la consommation est faible et à l’inverse, lors d’une consommation plus forte, rend de l’électricité au réseau.

Les technologies de stockage d’électricité disponibles aujourd’hui sont nombreuses et ont chacune leurs spécificités, que ce soit en termes de coûts, de maturité, ou de services rendus (durée, vitesse de stockage-déstockage, puissance ou de capacité de stockage de l’énergie).

Le stockage peut être réalisé de plusieurs manières différentes notamment par :

  • un stockage mécanique : deux retenues d’eau sont nécessaires, l’une plus en altitude que l’autre. Lorsque la consommation est importante, l’eau du bassin en hauteur est libérée pour produire de l’électricité par la force mécanique de la gravité. Lorsque la consommation est plus faible, de l’électricité est utilisée pour faire remonter de l’eau dans le bassin en hauteur.
  • un stockage chimique par piles ou batteries. À noter qu’une voiture électrique comporte une batterie qui stocke de l’électricité pour l’utiliser pendant la période où la voiture roule. La montée en puissance du parc de voitures électriques couplé avec l’intelligence des réseaux pourrait à terme offrir une flexibilité intéressante pour l’équilibre du réseau, via une injection dans le réseau d’électricité stockée dans les batteries des voitures.
  • un stockage thermique par chaleur (grâce aux ballons d’eau chaude par exemple).

Les capacités actuellement déployées en France s’appuient essentiellement sur les stations de transfert d’énergie par pompage (STEP) (5 GW de capacités installées). La PPE actuelle prévoit de renforcer encore ces capacités par un développement supplémentaire de 1,5 GW de STEP entre 2030 et 2035.

Le développement des batteries électriques s’est accéléré ces dernières années, mené notamment par l’essor des véhicules électriques. Le développement de la filière peut être soutenu par des appels d’offre, pour atteindre les objectifs de la PPE ou lorsque le bilan prévisionnel de RTE met en avant des besoins de flexibilité. Porté par la nette réduction des coûts constatée ces dernières années, le stockage par batteries devrait connaître une évolution significative à court terme, RTE estimant à 800MW la puissance raccordée d’ici fin 2023, contre 310 MW aujourd’hui.

Le stockage d’électricité via l’hydrogène, à l’origine de l’essor de la filière hydrogène décarboné (production d’hydrogène par électrolyse de l’eau grâce à de l’énergie bas-carbone quand la demande est faible, puis reconversion en électricité quand la demande est forte), apporte une solution de stockage supplémentaire.

Sur le long terme, la poursuite de la diversification du mix électrique devrait renforcer les opportunités de développement des différentes filières. En effet, dans son rapport « Futurs énergétiques 2050 », RTE identifie des besoins importants de flexibilité dans tous les scénarios. S’échelonnant entre 28 GW et 68 GW, ces besoins sont d’autant plus importants que la part d’énergies renouvelables dans le mix électrique l’est.