Fiche thématique n°17 : Les zones non-interconnectées

Certains territoires ne sont pas connectés au réseau d’électricité métropolitain continental et voient leur approvisionnement en électricité spécifiquement contraint : on les regroupe sous le nom de zones non interconnectées (ZNI).

Les zones non interconnectées (ZNI) regroupent :

  • La Corse ;
  • Les collectivités territoriales de la Guadeloupe, la Guyane française, la Martinique, La Réunion, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon et les îles de Wallis-et-Futuna.
  • Les îles du Ponant (Ouessant, Molène, Sein et Chausey), îles non interconnectées habitées à l’année.

Saint-Martin et Saint-Barthélemy ne sont pas couverts par les dispositions du code de l’Energie mais le droit de l’énergie applicable à la date de leur prise de compétence continue de s’appliquer. Suite à l’ouragan Irma, les compétences de ces deux territoires sont désormais encadrées par l’Etat, par le biais d’une convention, en échange d’un maintien du dispositif de péréquation.

La Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française ont des statuts particuliers et ne sont pas couvertes par les dispositions du code de l’Energie : ces territoires sont compétents et l’Etat n’intervient pas.

 

La production et la vente d'électricité dans les ZNI

Produire de l’électricité dans les ZNI revient plus cher qu’en métropole continentale. Plusieurs raisons parfois cumulatives expliquent les surcoûts de production dans les ZNI :

  • Des contraintes géographiques et insulaire (éloignement, transports, absence/prix du foncier) ;
  • Des limites de leurs infrastructures portuaires et routières ;
  • Des solutions technologiques spécifiques pour couvrir la demande en cas d‘aléas et d’entretien.

D’après la Commission de régulation de l’énergie, le coût moyen de production d’électricité dans les ZNI était de 257 €/MWh en moyenne en 2020.

€/MWh (2020) Corse Réunion Guadeloupe Guyane Martinique Mayotte
Coût moyen de production 201,6 238,9 276,3 299,5 295,6 335,2

Coût moyen de production par ZNI en 2020 (Source CRE)

Il y a des spécificités techniques à prendre en compte pour la production d’électricité :

  • Stabilité des réseaux, insertion des énergies renouvelables, nécessité de stockage ;
  • Développement des dispositifs de charge pour les véhicules électriques et hybrides rechargeables.

L’application de la péréquation tarifaire (les consommateurs d’électricité des ZNI paient un niveau de facture d'électricité identique à celui de la France continentale) induit une compensation correspondant à l’écart entre les coûts de production (thermique et énergies renouvelables) et les recettes de ventes issues des tarifs réglementés de vente (TRV). Les charges de service public de l’énergie pour les ZNI représentent environ 2 Mds€ soit 20 à 25% du total des charges, qui couvrent également le développement des énergies renouvelables.

Les charges de service public dans les ZNI, donnant lieu à compensation, comprennent notamment les surcoûts de production des fournisseurs historiques ou les surcoûts liés aux contrats d’achat d’électricité signés entre un producteur tiers et l’opérateur historique, coûts des ouvrages de stockage d’électricité gérés par le gestionnaire du système électrique, les coûts supportés par les fournisseurs d’électricité en raison de la mise en œuvre d’actions de maîtrise de la demande portant sur les consommations d’électricité, etc.

Cela conduit à une absence de marché de l’électricité dans les ZNI. Il n’y a ainsi pas d’offres de marché pour la fourniture d’électricité, uniquement des tarifs réglementés de vente (TRV) proposés par les fournisseurs historiques (EDF SEI, EDM à Mayotte, EEWF à Wallis-et-Futuna). Toutefois, la production est ouverte à la concurrence : des producteurs tiers (Albioma, Voltalia, EDF PEI, Akuo, etc.) vendent de l’électricité au fournisseur historique.

La maîtrise de la demande dans les ZNI

Le code de l’énergie prévoit que les actions de maîtrise de la demande en énergie puissent être prises en charge par les charges de service public de l’énergie dans la limite des surcoûts de production qu’elles permettent d’éviter. Initialement limitée aux coûts supportés dans les ZNI par le fournisseur historique, cette disposition a été étendue aux collectivités et aux opérateurs publics (à ce jour seule la Collectivité de Corse a signé une telle convention avec EDF et la Commission de régulation de l’énergie (CRE)).

En janvier 2019, la CRE a approuvé un important plan d’aide à l’investissement de 5 ans (période 2019-2023) pour favoriser la maîtrise de la consommation d’électricité dans les ZNI (travaux d’isolation des bâtiments, d’installation de chauffe-eaux solaires, de mise en place de climatiseurs ou d’éclairage performants, etc.). Ce programme représente un investissement de 530 M€. Sur la durée vie des équipements installés (entre 20 et 30 ans), on attend une réduction de 1,7 Md€ des charges de service public qui financent la péréquation tarifaire. L’accent est mis sur les clients en situation de précarité : 35% des aides leur sont destinées, soit plus de 180 M€ sur 5 ans.

Une fois déployées, les actions ainsi engagées devraient engendrer des économies d’énergie d’environ 880 GWh/an, près de 10% de la consommation d’électricité de ces territoires. La réduction des émissions de gaz à effet de serre sera d’environ 590 000 tonnes de CO2 par an soit une baisse de 8% des émissions liées à la production d’électricité dans ces territoires.

Les programmations pluriannuelles de l'énergie dans les ZNI

Les ZNI ont des ressources et des potentiels différents en matière de géothermie (Guadeloupe), de biomasse (Guyane), de bagasse (Réunion, Guadeloupe, Martinique), d’hydraulique (Réunion, Corse), d’éolien (Guadeloupe, Martinique, St Pierre et Miquelon) ou de photovoltaïque.

Ces territoires ont des dynamiques démographiques contrastées entre 2010 et 2020 :

  • C’est le territoire de Mayotte qui enregistré la plus forte progression en terme de démographie sur cette période, avec une croissance de 30%, devant la Guyane avec une croissance de 25% ;
  • La Réunion a connu une croissance soutenue (+4.7%) ;
  • A contrario, les départements des Antilles voient leur population diminuer, respectivement de -6.6% pour la Guadeloupe et de -9% pour la Martinique, et dans le Pacifique, Wallis et Futuna a vu sa population fondre de 14%.

Pour répondre à cette diversité de situation, le Code de l’Energie prévoit :

  • Des objectifs spécifiques fixés par l’article L.100-4 du code de l’énergie :
    • Pour la Corse et les îles bretonnes : reprise des objectifs métropolitains.
    • Pour Wallis et Futuna : 30% d’énergie renouvelable en 2030 et autonomie énergétique en 2050.
    • Pour tous les autres territoires : 50% d’énergie renouvelable en 2020 et autonomie énergétique en 2030.
  • Des modalités d’élaboration des programmations pluriannuelles de l’énergie (PPE) spécifiques : la Corse, la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte, la Réunion, Wallis-et-Futuna font l’objet d’une PPE distincte par territoire qui est co-élaborée entre le représentant de l’Etat et le Président de la Collectivité. Les îles du Ponant font quant à elles l’objet d’un volet annexé à la PPE nationale.

La Réunion est la seule zone non interconnectée à disposer d’une PPE couvrant les périodes de 2018 à 2023 et de 2024 à 2028. Elle a été publiée le 20 avril 2022. Elle prévoit un mix électrique 100% renouvelable dès 2025 avec une ambition forte sur le photovoltaïque, la conversion des centrales charbon à la biomasse solide et le recours aux bioliquides en substitution du fuel lourd.

La PPE de la Corse pour les périodes de 2016 à 2018 et de 2019 à 2023, a été publiée le 18 décembre 2015 et a fait l’objet d’une révision simplifiée le 11 décembre 2019. La procédure de sélection d’un opérateur pour la réalisation et l’exploitation d’une infrastructure d’alimentation en gaz naturel des centrales de production d’électricité, lancée le 10 février 2020 suite à la publication de la révision simplifiée de la PPE, est infructueuse. Il ne sera donc pas possible d’assurer l’alimentation en gaz naturel de la centrale du Ricanto dès le démarrage de cette dernière. Or, la future centrale du Ricanto est indispensable pour assurer la sécurité d’approvisionnement en électricité, en remplacement de la centrale du Vazzio qui est vétuste. Un recours aux bioliquides est actuellement à l’étude et nécessiterait une nouvelle révision simplifiée pour ne pas retarder le lancement du chantier.

La PPE de Mayotte a été publiée le 19 avril 2017. Les travaux de révision complète de la PPE pour les périodes de 2024 à 2028 et de 2029 à 2033 devraient reprendre en septembre 2022 : il s’agit, à la fois, de répondre à la demande croissante et au verdissement du mix.

La PPE de la Guadeloupe a été publiée le 19 avril 2017. Une révision simplifiée doit être publiée avant fin 2022 et devrait permettre de rehausser les objectifs de certaines énergies renouvelables pour 2023. Les travaux de révision complète de la PPE pour les périodes de 2024 à 2028 et de 2029 à 2033 devraient reprendre en septembre 2022 avec l’objectif d’avoir un mix électrique 100% renouvelable au plus vite.

La PPE de la Martinique a été publiée le 4 octobre 2018 et a fait l’objet d’une révision simplifiée le 30 juin 202. Les travaux de révision complète de la PPE pour les périodes de 2024 à 2028 et de 2029 à 2033 ont débuté en 2022.

La PPE de la Guyane a été publiée le 30 mars 2017 et a fait l’objet d’une révision simplifiée le 29 août 2021. Les travaux de révision complète de la PPE pour les périodes de 2024 à 2028 et de 2029 à 2033 ont débuté en 2022 avec l’objectif d’avoir un mix électrique 100% renouvelable sur la zone littorale au plus vite.

La PPE de Wallis et Futuna a été publiée le 24 septembre 2018. Les travaux de révision complète de la PPE pour les périodes de 2024 à 2028 et de 2029 à 2033 devraient débuter à l’automne 2022.

Saint Pierre et Miquelon devrait disposer d’une PPE fin 2022.