Publié le 13/01/2023 - 18h02
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A - Se limiter à optimiser l’existant, car il n’apparaît pas opportun de développer de nouveaux projets
Le développement de l’hydroélectricité par la construction de nouveaux ouvrages est aujourd’hui incompatible avec la préservation des milieux aquatiques. En effet, les cours d’eau français sont déjà fortement équipés, l’ensemble des sites présentant un intérêt énergétique important étant d’ores et déjà exploités. Sur le Bassin Rhône-Méditerranée notamment, le rapport sur l’état des eaux adopté par le Comité de Bassin le 6 décembre 2019 indique que les causes principales de risque de non atteinte du bon état en 2027 résident dans les perturbations hydro-morphologiques (53% des cours d’eau), les ruptures de continuité (39%) et les altérations hydrologiques (impact sur les débits, éclusées hydroélectriques par exemple pour 31 % des cours d’eau). Ainsi, les 3 premières pressions en termes de masses d’eau impactées, entrainant un risque de non atteinte du bon état pour les cours d’eau du bassin, sont des pressions qu’exerce l’usage hydroélectrique. Seules les zones à très fort enjeu écologique n’ont pas encore été équipées, et l’enjeu énergétique qu’elles représentent est mineur de par la faible puissance et le faible productible des installations pouvant y être implantées. Rappelons par ailleurs que ce type d’ouvrages ne possède pas ou peu de capacité de modulation et de production en réponse aux pics de consommation électrique, avantage dont seuls les grands ouvrages possédant une capacité de stockage peuvent se prévaloir. Enfin, la diminution des débits des cours d’eau, du fait des effets du changement climatique, condamne inexorablement le modèle économique de ces ouvrages. Ainsi, tout nouvel ouvrage hydroélectrique ne pourra être construit que sur des zones particulièrement sensibles d’un point de vue écologique, notamment (mais pas exclusivement) pour ce qui concerne les réservoirs biologiques. Ces nouveaux aménagements, quand bien même ils disposeraient des meilleurs équipements en matière de continuité écologique et gestion hydraulique, auraient des impacts résiduels majeurs sur les milieux aquatiques et les écosystèmes qu’ils abritent. Ces impacts sont incompatibles avec les enjeux et objectifs de bon état et de non dégradation. Le rapport environnemental du SDAGE Rhône-Méditerranée 2022-2027 aborde cette question de manière objective et rappelle les principaux enjeux à la fois hydroélectriques et écologiques. Nous ne pouvons que saluer cette analyse, qui reprend en particulier des éléments issus de la Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE) 2019-2028, et précise notamment : « La marge de manoeuvre de l'hydroélectricité (certes contrainte par la préservation des enjeux environnementaux, mais aussi par la nature même des équipements actuels à optimiser) reste en effet limitée par rapport aux objectifs visés pour le développement des autres énergies renouvelables, qui connaissent des performances environnementales et énergétiques en progression. (...) De plus : - l'importance des enjeux associés aux réservoirs biologiques justifie leur préservation (caractéristiques écologiques naturelles remarquables en raison de la présence d'une ou de plusieurs zones de reproduction ou d'habitat d'espèces aquatiques patrimoniales, leur situation en tête de bassin versant et leur continuité avec un ou plusieurs cours d'eau du bassin versant). Ces réservoirs biologiques sont essentiels à l'atteinte du bon état écologique, et cela d'autant plus dans un contexte de changement climatique ; - les enjeux environnementaux inscrits au sein de la PPE indiquent que les impacts des projets de faible puissance peuvent être importants (ennoiement et continuité écologique) et, qu'au regard des bénéfices attendus, leur développement doit être évité sur les sites présentant une sensibilité environnementale particulière (cas des réservoirs biologiques) ; - une des mesures d'évitement de la PPE est de limiter la construction de nouveaux obstacles à la continuité écologique en privilégiant l'optimisation de centrales actuelles et l'exploitation de barrages existants. Au regard de ces enjeux environnementaux, qui sont intégrés au sein de la PPE 2019-2028, l'atteinte des objectifs de la PPE s'appuie prioritairement sur l'optimisation des aménagements existants et la création de stations de pompage. » En conclusion, l’hydroélectricité nécessite une analyse particulière afin de s’assurer de la préservation des milieux aquatiques et du respect des objectifs de non dégradation de la DCE. Il est indispensable de dissocier la petite et la grande hydroélectricité, qui présentent des caractéristiques et donc des analyses coûts-bénéfices totalement différents. Il est par ailleurs nécessaire de contraindre fortement voire s’opposer à la construction d’ouvrages nouveaux, qui répondent avant tout à des enjeux particuliers et vont la plupart du temps à l’encontre de l’intérêt général. Au contraire, il est nécessaire d’orienter exclusivement l’usage hydroélectrique dans une démarche d’optimisation de l’existant qui, sous réserve de non dégradation, est la seule à même de faire émerger des projets « gagnant-gagnant » à la fois d’un point de vue énergétique et d’un point de vue écologique (voir par exemple les travaux d’optimisation réalisés sur la centrale hydroélectrique Romanche-Gavet).
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