Publié le 18/01/2023 - 18h22
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D - Autre proposition (à préciser et justifier dans le champ ci-après)
- RTE signale ainsi que la doctrine du pollueur-payeur est appliquée à contresens : le consommateur français est convié avec son obligation d’achat à subventionner l’énergie décarbonée cédée à bas prix à ses voisins polluants. De ce constat, l’étude des Futurs énergétiques 2050 ne tire aucune leçon et ne détecte aucun vice plus ou moins caché dans le paradigme appliqué à la politique de l’énergie électrique. Cette absence n’est pas compréhensible. Deux points méritent d’être relevés et d’en tirer les leçons : la concurrence et l’interconnexion. - La concurrence au sein du système électrique français. « Je me suis exprimé de manière générale sur l’ouverture à la concurrence des systèmes électriques en disant qu’elle avait été une erreur, ce que je pense toujours. Nous avons essentiellement perdu notre temps à faire quelque chose qui n’a apporté aucun élément positif. Cette ouverture à la concurrence a juste servi à enrichir des distributeurs, à divertir de la rente par rapport aux propriétaires des dispositifs de production et à créer des effets de volatilité dans les prix de marché dont nous voyons les effets en ce moment. Il ne faut donc pas aller encore plus loin dans cette direction. » Ainsi s’exprime le professeur M devant la « Commission d’enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d’indépendance énergétique de la France de l’Assemblée nationale », le 2 novembre 2022. Tout est dit. Comment assurer la sécurité de la distribution d’un bien de première nécessité qui transite de son site de production à son point de consommation à 300 000 km/s dans un système en réseau démultipliant les « responsabilités » entre un monopole de transport, une cohorte de producteurs diffus d’énergies obligeamment achetés par le réseau, un club de courtiers (traders) qui achètent et vendent à terme une marchandise non stockable et un fournisseur d’énergie pilotable décarbonée à haute valeur d’usage contraint de vendre à perte sa production ? Sauf erreur, ni la DG Énergie de la Commission, ni la Direction générale de l'énergie et du climat n’ont publié la moindre étude faisant le bilan de l’ouverture à la concurrence du marché de l’électricité pour les producteurs et pour les consommateurs. Au 20 h de France 2, le 1er février 2021, quelques mois avant le choc électrique de l’automne, une brève analyse est diffusée : « L’ouverture d'EDF à la concurrence a fait grimper les prix ; une facture qui explose pour tous les Français. Depuis l’ouverture à la concurrence, l’indice des prix à la consommation de l’électricité a augmenté de 60,36% entre 2020 et 2006. Pour faire de la place aux 33 fournisseurs d’électricité différents, les pouvoirs publics ont en effet augmenté davantage les tarifs régulés. "Il faut que les tarifs soient suffisamment élevés pour permettre aux nombreux concurrents d’EDF d’avoir un espace concurrentiel.", explique Raphaël Boroumand, professeur associé à l’École d’Économie de Paris. » Conclusion : si l’électricité, un bien de première nécessité, est trop bon marché, il ne peut pas y avoir de saine concurrence. La concurrence est inutile. Le tableau ci-dessous montre que la concurrence ne s’exerce que sur une part limitée à 42% de la valeur ajoutée de l’achat d’énergie. De ce fait et comme tous les électrons se ressemblent (bien fongible), normés par les voltages et la période imposés par le gestionnaire du réseau, l’incidence de l’ouverture à la concurrence de l’électricité sur le pouvoir d’achat des consommateurs, multipliant les intermédiaires parasites, est négative sur leur budget. Facture d’électricité d’un logement de 70 m2 du 17/09 au 16/11/2022 € % % prix énergie Énergie kWh 234 1 Turpe acheminement abonnement 14,06 6,01 Turpe acheminement consommation 5,47 2,34 Turpe totale 19,53 8,35 73,2% Prix énergie net 26,68 11,40 100,0% Taxes (TCFE + CSPE + CTA) 4,86 2,08 18,2% Turpe + taxes 24,39 10,42 91,4% TVA 7,98 3,41 Turpe + taxes + TVA 32,37 13,83 121,3% Total 63,45 27,12 237,8% Sur la facture, le prix des kWh ne constitue que 42% de la somme à payer. - L’interconnexion. Vu de la Commission, ce « chef-d’œuvre » de la construction européenne assure la libre circulation des électrons au sein de l’UE. Son objectif est d’optimiser le système de production en équilibrant les excédents des uns avec les déficits des autres. En théorie, l’interconnexion n’a que des vertus. En pratique, elle fait face à deux graves inconvénients. - Une interconnexion cohérente nécessite un réseau monopolistique au sein de son espace opératoire et une commune structure de tarification. Or l’interconnexion européenne est faite d’autant de réseaux et de structures de tarification que d’États. Dans le cas de la France, la tarification est basée sur une péréquation nationale indifférente à la distance de livraison. Le coût de cette péréquation est fondu dans le TURPE pour les 94 départements contigus et dans la CSPE pour les départements zones non interconnectées (ZNI). Aucune comptabilité analytique publiée ne compare les coûts de la péréquation par abonné au réseau en fonction de la localisation de son compteur sur le territoire national. Il n’est pas envisagé à Bruxelles d’harmoniser les réseaux en termes de tarification et de sécurité de leur système de transformation / transport. La péréquation si elle est appliquée dans tous les pays restera nationale. Les pays à forte densité de peuplement comme les Pays-Bas bénéficient d’avantages certains sur les pays à faible densité de peuplement et/ou à excroissances insulaires. La solidité de la chaîne de solidarité électrique créée par l’interconnexion est celle du maillon le plus faible. Le risque de rupture s’aggrave avec la longueur de la chaîne. Le black-out, c’est-à-dire la disjonction en cascade des nœuds de réseau, coupe le courant sur une grande partie voire sur l’ensemble du territoire desservi par l’interconnexion.
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